Le recours collectif en matière financière, vers une meilleure protection des épargnants.


Introduction
L’accroissement des litiges financiers collectifs et la multiplication des préjudices subis par les épargnants ont conduit le législateur à prévoir un mécanisme permettant à plusieurs investisseurs lésés de se regrouper et d’agir en justice de manière coordonnée. En France, si l’action de groupe dite « consommation » a été instaurée par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, un dispositif spécifique existe pour les affaires financières, codifié au sein du Code monétaire et financier. Cette procédure vise à renforcer la protection des épargnants et à leur offrir un recours plus efficace et moins coûteux que les actions individuelles economie.gouv.frafg.asso.fr.


I. Évolution et cadre juridique de l’action collective en matière financière

L’action en représentation conjointe des investisseurs trouve son origine dans la loi n° 94-679 du 8 août 1994, qui a ouvert la possibilité pour des associations agréées de se substituer aux actionnaires ou porteurs de produits financiers lésés. Ce mécanisme est aujourd’hui codifié aux articles L. 452-1 et suivants du Code monétaire et financier (CMF) et précise que « lorsque plusieurs personnes physiques (…) ont subi des préjudices individuels causés par le fait d’une même personne et ayant une origine commune, toute association mentionnée à l’article L. 452-1 peut, si elle est mandatée par au moins deux de ces investisseurs, agir en réparation devant toute juridiction » afg.asso.fr. Parallèlement, la montée en puissance des actions collectives dans l’Union européenne a conduit à l’adoption de la directive (UE) 2020/1828 du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives, dont la transposition en droit français, envisagée en 2025, devrait faciliter les recours transfrontaliers et renforcer l’effectivité de la réparation gide.com.


II. Conditions et modalités de mise en œuvre

A. Associations habilitées

Seules les associations régulièrement déclarées et agréées, dont l’objet statutaire comprend explicitement la défense des investisseurs en titres ou produits financiers, peuvent engager une action en représentation conjointe (art. L. 452-1 CMF). L’agrément est délivré par décret, après avis du ministère public et de l’Autorité des marchés financiers, et exige notamment six mois d’existence, au moins 200 membres cotisants et des dirigeants répondant à des critères d’honorabilité et de compétence afg.asso.frsenat.fr.

B. Mandat des investisseurs

Pour être recevable, l’action doit reposer sur un mandat exprès, écrit et individuel, accordé par au moins deux investisseurs concernés (art. L. 452-2 CMF). Le code proscrit toute sollicitation par voie d’appel public ou de tract, sauf autorisation expresse du président du tribunal, afin de garantir la confidentialité et la loyauté dans la constitution du groupe de mandants afg.asso.frafg.asso.fr.


III. Vers une meilleure protection des épargnants : bilan et perspectives

Malgré ce dispositif, l’action en représentation conjointe a rencontré un succès limité : selon un rapport de la Commission consultative Épargnants de l’AMF, une seule association agréée en matière financière existe, et aucune n’a, à ce jour, effectivement exercé de recours collectif en raison des lourdeurs administratives et du coût de collecte des mandats afg.asso.framf-france.org.

Plusieurs pistes de réforme sont aujourd’hui à l’étude :

  • Transposition de la directive (UE) 2020/1828 : un projet de loi déposé en 2023 par les députés Laurence Vichnievsky et Philippe Gosselin prévoit d’étendre le champ d’application et de simplifier les procédures de recours, notamment pour les actions transfrontalières gide.com.
  • Allégement des formalités de mandat : envisager la possibilité d’un mandat collectif unique, sous forme dématérialisée, pour diminuer les coûts de gestion et encourager la participation des victimes.
  • Encadrement des frais et honoraires : instaurer un barème de prise en charge des frais d’avocat et d’expertise pour éviter que les coûts n’absorbent une partie significative des indemnisations.

Conclusion
Le recours collectif en matière financière constitue un instrument prometteur pour consolider la protection des épargnants. Toutefois, l’efficacité de ce mécanisme dépend étroitement de sa simplification procédurale et de l’adaptation de son cadre législatif aux enjeux contemporains, notamment face à l’internationalisation des litiges financiers. Les réformes à venir, dictées tant par le droit européen que par les besoins concrets des investisseurs, devraient permettre de transformer l’action en représentation conjointe en un véritable levier de réparation et de dissuasion des pratiques abusives.

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